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Je ne reviens pas ici sur les conditions dans lesquelles deux UIOM successives ont pollué pendant trente ans le site de l'incinérateur de Gilly-sur-Isère, près d'Albertville (Savoie), et son environnement : se reporter à la rubrique HISTORIQUE précédente.
Je reprends par contre les éléments qui me semblent essentiels pour comprendre l'affaire judiciaire en cours, en commençant par 2001, année de la suspension du fonctionnement de l'incinérateur.
Dès 2002, de nombreuses plaintes ont été déposées.
Après huit années d'instructions et de procédures, le 9 septembre 2009, la Chambre d'Instruction de la Cour d'Appel de Chambéry a renvoyé devant le Tribunal Correctionnel les deux personnes morales mises en examen en mai 2007 :
pour délit d'exploitation non autorisée et non conforme d’une installation classée pour la protection de l’environnement du 1er mars 1994 au 25 octobre 2001.
Nous attendions depuis un an l'annonce de la date de ce procès. Voilà qui est fait en automne 2010 : Le jugement tant attendu des responsables devant le Tribunal Correctionnel d'Albertville est prévu les 29 et 30 novembre 2010, mais avec l'annonce d'une nouvelle incroyable : le SIMIGEDA, syndicat d'élus, n'est plus concerné (voir la première page du site)!
De nombreuses plaintes ont été déclarées irrecevables : seules 6 associations restent aujourd'hui parties civiles.
Il faut bien souligner, ce que l'on oublie trop souvent de rappeler, qu'il y a malheureusement prescription juridique (en raison de la parution du nouveau code de procédure pénale du 1er mars 1994) pour la période de fonctionnement la plus polluante de l'incinérateur. La seule période retenue est celle du 1er mars 1994 au 25 octobre 2001 (fin du fonctionnement de la 2ème UIOM), ce qui ne couvre que 7 années sur les 30 années de pollution du site et de son environnement !
Comment et pourquoi en est-on arrivé là ? A la fois témoin et acteur dans cette affaire depuis 1992, je considère de ma responsabilité, hors de toute polémique partisane, de rappeler maintenant des faits authentiquement vécus.
Pour les années précédentes, ou pour d'autres détails, se reporter à l' HISTORIQUE
Je commence en 2001, date de la fermeture de l'UIOM de Gilly-sur-Isère, et année décisive pour la suite judiciaire de l'affaire.
Premier semestre 2001 : J'accepte d'aider des Militants des Verts à tenir des réunions publiques "sur la dioxine": voir mon intervention à la Réunion Publique des Verts de mai 2001 ( PDF )
En juin et octobre 2001 : Devant l'inertie du SIMIGEDA, l'exploitant de l'UIOM, NOVERGIE, décide de faire analyser des prélèvements de fumées. Les résultats en PCDD/F sont extrêmement et anormalement élevés :
Le chiffre de 1285 ng.ITEQ/Nm3 a provoqué plus tard de nombreuses polémiques, par son énormité et le fait qu'il n'avait pas été dévoilé.
En ce qui me concerne, je pense que le chiffre de 1285 ng.ITEQ/Nm3 peut s'expliquer par le dysfonctionnement de l'électrofiltre : voir à ce sujet mes notes sur ces analyses des fumées de juin 2001 dans le courrier du sous-préfet responsable du pôle de compétences dioxines, de septembre 2003.
Je reviendrai plus bas sur cette question des fumées, dans les commentaires.
Je pense qu'il y a une CONFUSION, qu'il faudrait rapidement voir levée, entre
A ce sujet, ayant entendu dire à l'époque qu'on lançait des opérations d'analyses, j'avais demandé au SIMIGEDA de faire effectuer non seulement des analyses de lait à proximité du site (ce qui était prévu dans son protocole initial) mais surtout des analyses des fumées de l’incinérateur en sortie de cheminée (ce qui n’était pas prévu).
Voir mon courrier, pour le CATBA, au SIMIGEDA de juillet 2001 ( PDF ), et la réponse du SIMIGEDA de juillet 2001 ( PDF ).
Compte tenu de l'importance que revêt ce sujet des analyses dans la décision ultérieure des autorités de suspendre le fonctionnement de l'UIOM de Gilly-sur-Isère, il est indispensable que nous sachions enfin clairement ce qu'il en est réellement : quelles analyses ont été réalisées, par qui, à quelles dates précises, et quels en ont été les résultats, rendus à quelles dates...Cette confusion systématiquement entretenue jusqu'à présent ne justifierait-elle pas une enquête complémentaire ?
29 juin 2001 : je démissionne de mon poste de président de Bien Vivre à Grignon pour me consacrer à mes autres travaux sur les déchets (coordination des Collectifs associatifs, FRAPNA, Commission de révision du PDED)
25 octobre 2001 : Le préfet de Savoie, Paul Girot de Langlade, signe l'arrêté qui suspend le fonctionnement de la deuxième UIOM de Gilly-sur-Isère.
Novembre 2001 :
Le 5 décembre 2001 : à Albertville, réunion du Collectif Associatif TARENTAISE - BASSIN ALBERTVILLOIS (CATBA) : aucune des associations présentes, y compris Bien Vivre à Grignon, ne souhaite participer à la plainte mise à l'étude par la FRAPNA-Savoie avec l'aide du service juridique de la Fédération FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT.
Le 6 décembre (le lendemain) : à Gilly-sur-Isère, réunion publique importante, organisée par quatre militants ou sympathisants des VERTS, dont Me Thierry Billet, avocat au Barreau d'Annecy, et Michel Roulet, conseiller municipal d'Albertville et délégué titulaire au sein du SIMIGEDA depuis 1995.
Ils proposent la création d’une association de défense des riverains de l’incinérateur, et la mise en route d’une plainte contre « les responsables de la pollution par la dioxine».
Avant fin décembre : Création de l’ACALP (Association Citoyenne Active de Lutte contre la Pollution), avec comme avocat-conseil Me Thierry Billet.
30 janvier : à Gilly-sur-Isère, Conférence de presse (voir le document PDF) de la FRAPNA-Savoie, avec invitation des principales organisations ou associations du Collectif Associatif de Savoie (CAS : voir liste).
16 février 2002 : j'ai eu la grande surprise de lire un courrier assez révélateur de la part de mon successeur à la présidence de Bien Vivre à Grignon(voir document PDF) adressé, semble-t-il sans avoir reçu un quelconque mandat de son conseil d'administration, à tous les présidents des associations du Collectif Associatif Tarentaise - Bassin Albertvillois (CATBA, 1997-2002) où il nie le rôle de notre association dans les études sur les déchets, et invite carrément les adhérents à rejoindre pour les plaintes l'ACALP récemment créée!
Je n’ai pas vérifié si ce courrier adressé aux présidents des associations adhérentes du Collectif Associatif Tarentaise – Bassin Albertvillois est bien arrivé en son temps à destination.
Ce courrier est d'autant plus surprenant qu'il signera la lettre du 24 juillet suivant où notre association soutient officiellement la plainte de la FRAPNA-Savoie.
Comme il avait rejoint l'ACALP dès la création de celle-ci, je traduis cet épisode comme une tentative de sa part de rallier un maximum de personnes à l'ACALP nouvellement créée. Ceci dit, il n'a pas entraîné avec lui beaucoup d'autres adhérents de Bien Vivre à Grignon.
27 février 2002 : La FRAPNA-Savoie dépose une plainte auprès du Procureur de la République d’Albertville contre deux personnes morales : le propriétaire de l’UIOM de Gilly-sur-Isère (le SIMIGEDA), et son exploitant (NOVERGIE); Pour trois motifs :
Je rends ici un hommage particulier à Jean André, professeur à l'Université de Savoie, qui a honoré par son comportement la fonction de Président - pour la Savoie- d'une Fédération Régionale reconnue d'utilité publique depuis 1984.
12 et 20 mars 2002 : De nombreuses plaintes individuelles (165) mandatées par l'ACALP, et 5 plaintes de personnes morales (dont une associée au CATBA, l'association Alliance du Bassin Albertvillois) sont déposées sous l'égide de Me Billet auprès du doyen des juges d’Instruction du Tribunal de Grande Instance d’Albertville, avec dépôt d'une caution avancée par l'ACALP. Plaintes nommément contre le Président du SIMIGEDA, le Préfet de Savoie et le Directeur technique de NOVERGIE Centre-Est ; Pour empoisonnement, mise en danger délibérée, coups et blessures involontaires, homicides involontaires, abstention délictueuse.
3 juin 2002 : le Procureur de la République d’Albertville ouvre une information judiciaire contre X des chefs d’accusation d'homicides involontaires, blessures involontaires, mise en danger de la vie d’autrui
Le même jour, il envoie un fax à la FRAPNA-Savoie pour l’en informer et lui demander si cette association souhaite y participer.
10 juin 2002 : La FRAPNA-Savoie donne son accord au procureur d’Albertville.
Afin qu'il n'y ait pas de confusion au sujet des plaintes, l'information judiciaire contre X proposée par le Procureur de la République d’Albertville n'a rien à voir avec la plainte de la FRAPNA-Savoie du 27 février 2002, qui ne recevra jamais de réponse malgré de nombreuses relances.
Juillet 2002 : Création de l'ADES (Association de Défense de l'Environnement et de la Santé) à Grignon. Contact du président et du vice-président de cette association avec un cabinet d'avocats parisien spécialisé dans les affaires d'indemnisation des victimes.
24 juillet 2002 : L’association Bien Vivre à Grignon soutient la plainte de la FRAPNA-Savoie du 27 février.
30 juillet 2002 : La FRAPNA-Savoie insiste en déposant une seconde plainte concernant la pollution du milieu (air, eau, sol), non prise en compte dans l’instruction en cours.
6 septembre 2002 : démission du deuxième président de Bien Vivre à Grignon pour raisons personnelles.
7 octobre 2002 : Le juge d’Instruction de l’affaire demande à Bien Vivre à Grignon si cette association désire également se porter partie civile.
19 novembre 2002 : Le troisième président de Bien Vivre à Grignon, Charlot Raymond, donne son accord au juge d'Instruction, au nom de son conseil d'administration.
Je tiens ici à saluer la mémoire de mon grand ami mauriennais Charlot Raymond, troisième président de Bien Vivre à Grignon, qui nous a quitté en février 2004, victime de l'amiante.
Quant à la FRAPNA-Savoie, je reste toujours étonné d'avoir dû constater qu'elle semble avoir abandonné progressivement sa plainte. J'ai donné ma démission du Conseil d'Administration de la FRAPNA-Savoie le 1er juillet 2003, ce qui explique peut-être que je n'ai pas été tenu au courant. Je n'ai, à ma connaissance, pas été remplacé dans les différentes commissions encore en cours, où je siégeais au nom de la FRAPNA-Savoie.
Je regrette d'autant plus cet abandon que la préparation de la première plainte du 27 février 2002, dont j'avais été le co-auteur, avait été complexe à mettre en oeuvre, et que nous avions dû relancer la Justice de nombreuses fois à son sujet, en vain puisqu'elle n'a jamais reçu de réponse. Voir en conclusion mes regrets sur la non prise en compte par la Justice de la Pollution du Milieu (silence complet) et de la Mise en danger d'Autrui (rejetée par la Cour d'Appel).
Je me réjouis que l'association Bien Vivre à Grignon reste aujourd'hui partie civile dans cette affaire judiciaire.
Dès le premier trimestre, près de cinquante plaintes individuelles sont déposées auprès du cabinet du Doyen des juges d'Instruction du Tribunal de Grande Instance d'Albertville. Elles proviennent toutes d'adhérents de l'ADES.
Le cabinet parisien déjà cité est leur conseil.
Je salue la mémoire de mes amis mauriennais, président et vice-président de l'ADES, Dieter Beele et Gilbert Morard, beaucoup trop tôt disparus.
En juin 2003, L'association Bien Vivre à Grignon écrit au juge d'Instruction pour lui demander des compléments d'expertise : voir le courrier de 2003 (PDF) joint à la lettre de 2004. Il n'y a pas eu de réponse.
1er Juillet 2003 : je donne ma démission du Conseil d'Administration de la FRAPNA-Savoie (voir ci-dessus)
6 février : Je suis convoqué comme témoin devant le juge d’Instruction (sous caméra de télévision).
A cette occasion, le juge d'Instruction accepte de ma part un dossier constitué de 22 documents : deux d'entre eux ont une importance particulière. Le courrier de la responsable du pôle d'action sanitaire local de septembre 2003 confirmant mon intervention lors de la session du Comité de Suivi du Plan d'action sanitaire local, le 30 juin 2003 à Chambéry . J'y avais relevé que l'électrofiltre de l'incinérateur avait dû avoir des périodes de dysfonctionnement importantes. Ces dysfonctionnements étaient déjà constatés avant 1992 : autre document fourni, mon courrier de 1992, écrit au nom de Bien Vivre à Grignon, au SIMTOM d'Albertville et la réponse de celui-ci.
Je reviendrai sur le problème de l'électrofiltre dans mon commentaire final .
En juin 2004, j'écris au juge d'Instruction (voir document PDF), pour lui rappeler la précédente demande de Bien Vivre à Grignon de 2003 concernant des compléments d'expertise. Il n'y a pas eu de réponse..
2 octobre 2006 : Ordonnance d'irrecevabilité de constitution de parties civiles concernant 165 personnes physiques, et 5 personnes morales :
L'ACALP, qui avait payé la consignation exigée pour l'ouverture des plaintes, en a été remboursée par la suite.
22 mai 2007 : Réquisitoire supplétif (du Procureur - le Parquet -) des chefs d’accusation d'exploitation non autorisée et non-conforme d’une installation classée pour la protection de l’environnement, et mise en examen du syndicat SIMIGEDA et de la société civile NOVERGIE Centre-Est.
26 octobre 2007 :
30 octobre 2007 : Déclaration d'appel de l’association Bien Vivre à Grignon concernant exclusivement le chef d'accusation de "mise en danger d’autrui", qui vient d’être jugée de non-lieu par l’ordonnance du 26 octobre.
En novembre 2007 : j'écris au procureur d'Albertville : "La qualification de "mise en danger d’autrui" n’a pas été retenue. Faut-il en déduire que toutes les conséquences des pathologies résultant de la pollution reconnue de l’UIOM de Gilly-sur-Isère n’ont pas toutes une correspondance applicable possible avec les articles actuels du code de procédure pénal ? En d’autres termes, plus directement, pourquoi l’instruction judiciaire a-t-elle concentré l’essentiel de ses efforts sur le seul diptyque « dioxine, cancer » alors que le réquisitoire introductif du 3 juin 2002 n’en faisait pas mention, stricto sensu".
Je regrette effectivement que la notion de "mise en danger d'autrui" soit trop souvent réduite au seul lien dioxine-cancer, alors qu'il s'agit d'une expression juridique, demande faite par la FRAPNA dans sa plainte du 27 février 2002.
La mise en danger d'autrui recouvre un sens encore plus large du point de vue sanitaire, peut s'appliquer à d'autres pathologies que les seuls cancers, être liée à d'autres micropolluants que les seules dioxines...
Il y a donc apparemment impossibilité d'invoquer ce chef d'accusation, du moins devant un tribunal civil : je reviendrai sur cette notion plus bas dans la conclusion.
Je lui demande également pourquoi je n'ai pas retrouvé trace de mon témoignage (voir plus haut), ni du constat établi de la responsabilité de l’ensemble des délégués – titulaires du Simtom d’Albertville, puis du Simigeda.
De nombreux rebondissements procéduraux, avec l'avocat-conseil Me Thierry Billet, ont émaillé l'instruction judiciaire jusqu'en 2009
9 septembre 2009 : Arrêt de la Chambre d’Instruction de la Cour d’appel de Chambéry :
voir ma comparaison succinte des types de plaintes, en partant de l'exemple de la FRAPNA-Savoie
J'ai été convoqué comme témoin le 6 février 2004 (voir ci_dessus) devant le juge d'Instruction chargé de l'affaire.
Je veux commenter maintenant le témoignage de l'ancien maire de Grignon (mandats de 1995 à 2007). Délégué titulaire au sein du SIMIGEDA depuis 1990 - et membre exécutif de son bureau depuis 1995-, actuellement conseiller général d’Albertville-Sud.
Dans son témoignage devant le juge d’Instruction - je cite : "Il indiquait avoir été à l’initiative des analyses de dioxine, suite à la demande de nombreux administrés malades de sa commune. Il précisait avoir décidé de faire procéder à des prélèvements particulièrement coûteux(...) en raison de l’inquiétude des concitoyens(...). Je tiens à dire que quelques années avant la fermeture de l’usine nous constations de grosses fumées noires, notamment la nuit et le matin, et des poussières noires se déposaient sur les voitures en centre – ville (...). Nous avons fait mettre un filtre..."
Je laisse à son auteur la responsabilité de son témoignage. Je tiens toutefois à rappeler les faits suivants :
Pour conclure ce Volet judiciaire, je comprends l'amertume ressentie par toutes les personnes qui, en toute bonne foi, ont considéré de leur devoir de citoyen de se porter partie civile, pour finalement voir leur démarche déclarée irrecevable.
D'autre part, aujourd'hui seuls sont reconnus par la Justice les points suivants
La FRAPNA-Savoie, à deux reprises, a porté plainte à la fois pour pollution du milieu et pour mise en danger d'autrui. Ces qualifications non pas été retenues par la Justice.
Pour moi, tout tourne autour des deux courriers, déjà cités, donnés au juge d'Instruction parmi 22 autres documents lors de mon témoignage le 6 février 2004 :
Il ne m'apparaît pas que ces éléments aient été pris en compte par la Justice durant ces 8 années d'instruction judiciaire. Je le regrette, et je me demande s'il n'y a pas là une occasion manquée ?
Aujourd'hui, je me demande si nous n'avons pas fait l'erreur de ne pas évoquer la notion du principe de précaution dans toute son ampleur (voir ma conclusion de l'historique des pollutions).